La journée se doit de démarrer dans une frénésie qui n'est pas loin de rappeler celle, justement, de Noël : on traîne un peu au lit, mais pas trop, car il y a beaucoup à faire, on se souhaite mutuellement un "Happy Thanksgiving", ainsi qu'aux inconnus croisés dans la rue, tout le monde est heureux, beau et intelligent et les nouvelles sont encore plus vides qu'à l'accoutumée car il faudrait bien voir à ce qu'aucun conflit armé vienne porter obstruction à la joie qui s'est emparée de la demeure... ah on avait dit pas de mauvais esprit, pardon.

Je le f'rai plus Madame.

Peut-être.

Surtout que ma maisonnée est inhabituellement calme, ma gentille coloc' s'étant envolée hier pour rejoindre sa famille, et ma coloc' chinoise ayant déserté pour dix jours qu'elle passe à New York en compagnie de je ne sais qui, nous laissant un plein évier de vaisselle sale en héritage. J'aimerais en profiter pour nettoyer à fond, mais ma lombalgie est toujours là et j'éviterai donc de l'aggraver[1]. Je me contente donc d'écouter la musique à fond (sur mon iPod : Franz Ferdinand, Ugly Duckling, Au Revoir Simone, les Decemberists, Garba-b-ge, et les Pipettes. Pour l'instant.)

En attendant, le but de la journée est le dîner de Thanksgiving. Pour des raisons d'emploi du temps (obligations familiales des uns et caritatives des autres) nous dînons à 19h30, mais traditionnellement on zappe le déjeuner et on s'attable vers 16h. La réunion se doit bien évidemment d'être familiale, mais certaines difficultés logistiques (comme le fait d'habiter à trois milliers de kilomètres et six ou huit cent dollars de sa famille pour les plus Américains d'entre nous) s'en mêlant, nous nous réunissons en une assemblée amicale, une joyeuse bande composée à presque 50\% d'authentiques États-Uniens (le reste étant allemand, japonais, suédois, libanais ou français). Mais nous tenons à respecter la tradition !

Au menu donc :

  • une dinde. C'est indispensable. Cette année, pas de végétalienne convaincue dans l'assemblée, et je m'en réjouis d'avance : Thanksgiving se fera avec une dinde ou ne se fera pas !
  • de la farce (stuffing) pour accompagner la dinde ;
  • de la sauce aux canneberges (cranberries sauce) pour accompagner le tout ;
  • une multitude d'accompagnements, comprenant notamment de la purée de pommes de terre et un plat à base de maïs. Cette année nous y ajoutons des haricots verts, un gratin de choux-fleurs, des patates douces, des choux de Bruxelles et des nouilles aux oeufs ;
  • une tarte aux pommes ;
  • une tarte au potiron (ou à la citrouille, je ne sais jamais, bref, une pumpkin pie). Tellement indispensable que nous en avons deux cette année, une classique faite de mes blanches mains et une "surprise" dont s'occupe une des Américaines ;
  • de la glace à la vanille.

Le tout se doit évidemment d'être bien arrosé, et il relève de la tradition d'ouvrir une bouteille de mousseux (ou de Champagne pour les plus fortunés) avec le dessert. Comme à Noël !

En attendant de manger, et tout en s'affairant aux cuissons et arrangements de dernière minute, il est aussi habituel de regarder le foutche à la télévision. Quand je dis foutche, je veux dire foutche américain. Il y a en général suffisamment à faire pour que j'évite de m'ennuyer comme un rat crevé devant ce sport qui me laisse de marbre (et plus encore). Cette année, apparemment, ce sera les Colts (d'Indianapolis, équipe favorite de notre hôte) contre les Falcons (d'Atlanta).

La soirée se finira certainement par une partie de poker et une petite promenade digestive...

Et demain, ce sera le vendredi noir. Le Black Friday. Le jour des plus énormes soldes que connaissent les États-Unis. Le jour où tout le monde profite du pont pour se précipiter dans les magasins, s'arracher des téléviseurs au quart de leur prix, se taper dessus à coup d'imprimantes à prix cassés, et rentrer épuisés, la tête prête à exploser, mais à moitié parés pour Noël. Certains magasins ouvrent leurs portes dès quatre heures du matin, et les gens s'y précipiteront, encore à moitié saouls, dès cette heure indécente... quant à moi je me contenterai du Black Friday online pour me procurer le cadal du Blondinet.

Mais les fourneaux m'attendent, je souhaite donc un Happy Thanksgiving à tous ceux qui me lisent depuis les États-Unis (au nombre de deux si je ne m'abuse), et je file.

Notes

[1] Non, pas "agrafer", con de correcteur orthographique.